„Pour les politiques, l'arsenal - des sanctions économiques, des zones d'exclusion aérienne et des interventions humanitaires au nom du droit d'ingérence - est ressorti réflexivement. Pour les experts, un post-islamisme serait en train de naître, et Al-Qaida, qui avait pourtant fait de la chute des régimes arabes autoritaristes l'une de ses trois invariables revendications depuis 1996, serait une grande perdante désemparée. Retour des catégories, régénération de la dangerosité et surdité factuelle.
En réalité, tous ces paramètres sont désormais obsolètes, et les pays arabes vivront chacun différemment les changements en cours selon leur contexte sociopolitique propre. De même, l'apprentissage de la démocratie sera assurément ardu pour ces pays longtemps sous le joug de la répression, mais pas plus qu'il ne l'a été pour les pays de l'Europe de l'Est ou ceux d'Amérique du Sud.
Au final, les changements des dernières semaines ont vidé de leur sens les analyses orientalistes. La fin de l'exception arabe doit également valoir pour des schémas de pensée qui ont longtemps accompagné complaisamment ces particularismes. Et le monde arabe devra désormais être compris simplement par le biais des catégories universelles de la libéralisation politique et de la transition démocratique.”